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0822 - Bobst Group SA

Décision 822/02 du 2 septembre 2022

Offre publique d’acquisition de JBF Finance SA aux actionnaires de Bobst Group SA – Prospectus d’offre et rapport du conseil d’administration

Faits :

A.
Bobst Group SA (Bobst) est une société anonyme de droit suisse dont le siège se trouve à Mex et qui est inscrite au registre du commerce du canton de Vaud sous le numéro CHE-109.107.774. Bobst a pour but la participation à des entreprises industrielles, commerciales et financières, notamment dans le domaine de l’emballage et des industries connexes. Son capital-actions s’élève à CHF 16'518'478, divisé en 16'518'478 actions nominatives liées, d’une valeur nominale de CHF 1 chacune, entièrement libérées (les actions Bobst). Les actions Bobst sont cotées auprès de SIX Swiss Exchange (SIX) sur le segment Swiss Reporting Standard (symbole de valeur : BOBNN ; ISIN : CH0012684657).

L’art. 12 des statuts de Bobst contient une clause d’opting out. Celle-ci prévoit que « l’obligation de présenter une offre d’achat, portant sur tous les titres cotés de la société (article 32 de la Loi fédérale sur les bourses et le commerce des valeurs mobilières du 24 mars 1995), ne s’applique pas aux propriétaires et acquéreurs d’actions nominatives de la société (article 22 alinéa 2 et article 52 de la Loi) ».

Le conseil d’administration de Bobst est actuellement composé d’Alain Guttmann (président), Thierry de Kalbermatten (vice-président), Gian-Luca Bona, Jürgen Brandt et Philip Mosimann.

B.
Selon les informations disponibles auprès de l’Instance pour la publicité des participations de SIX Exchange Regulation, les actionnaires principaux de Bobst sont, à ce jour, les suivants :

- Depuis le 20 novembre 2021, JBF Finance SA (JBF ; cf. infra let. C) détient, comme actionnaire direct, 8'823'906 actions Bobst, représentant 53.42% des droits de vote de Bobst. Les ayants droit économiques de cette participation sont les actionnaires de JBF. Au nombre de 62, ces actionnaires sont tous des personnes physiques, à l’exception d’une fondation.

- Depuis le 26 février 2021, J. Safra Sarasin Investmentfonds AG, Bâle, détient, comme ayant droit économique, 496'000 actions Bobst, représentant 3.0027% des droits de vote de Bobst.

 

C.
JBF est une société anonyme de droit suisse dont le siège se trouve à Buchillon et qui est inscrite au registre du commerce du canton de Vaud sous le numéro CHE-101.056.239. JBF a pour but la conservation, le renforcement et la gestion d’une participation déterminante et durable dans le capital-actions de Bobst. Son capital-actions s’élève à CHF 107'416'761, divisé en 268'878 actions nominatives liées, d’une valeur nominale de CHF 399.50 chacune (les actions JBF).

Le conseil d’administration de JBF est actuellement composé de Thierry de Kalbermatten (président), Simon Rivier, Jean-Pascal Bobst, Dominique Brustlein, Michèle de Preux, Alain Guttmann, Hervé Rüttimann et Yves Rüttimann.

D.
Les actionnaires de JBF sont liés par une convention d’actionnaires, conclue en 2008 (la Convention d’Actionnaires). Celle-ci prévoit des dispositions caractéristiques de ce genre de conventions et répartit les actionnaires en quatre sous-groupes familiaux. Elle a pour objet, d’une part, le contrôle du cercle des détenteurs des actions JBF et, d’autre part, la représentation des sous-groupes d’actionnaires au sein du conseil d’administration de JBF.

E.
Le 4 juillet 2022, JBF a saisi la Commission des OPA (la Commission) d’une requête en examen de questions préliminaires concernant une offre publique d’acquisition portant sur les actions Bobst.

Par décision 822/01 du 14 juillet 2022, la Commission a partiellement fait droit aux conclusions de cette requête (la décision 822/01 du 14 juillet 2022). Elle a considéré que la clause d’opting out figurant à l’art. 12 des statuts de Bobst (cf. supra let. A) était valable du point de vue du droit des OPA et déployait ses effets à l’égard de tout actionnaire ou groupe d’actionnaires qui franchirai(en)t le seuil de 33⅓% des droits de vote de Bobst (cf. décision 822/01 du 14 juillet 2022, chiffre 1 du dispositif). Elle a constaté que la convention d’actionnaires conclue en 2008 entre les actionnaires de JBF (cf. supra let. D) ne fondait pas l’existence d’une action de concert dans le cadre d’une offre publique portant sur les actions Bobst, dans l’hypothèse d’une telle offre, ce sous certaines réserves (cf. décision 822/01 du 14 juillet 2022, chiffre 2 du dispositif). Elle a également constaté que Thierry de Kalbermatten et Alain Guttmann agiraient de concert avec JBF dans le cadre d’une offre publique portant sur les actions Bobst, dans l’hypothèse d’une telle offre (cf. décision 822/01 du 14 juillet 2022, chiffre 3 du dispositif). Enfin, elle a admis que la durée de l’offre puisse être réduite à 10 jours de bourse, pour autant que le rapport du conseil d’administration de Bobst soit effectivement publié dans le prospectus de l’offre et que JBF conserve une participation majoritaire dans Bobst (cf. décision 822/01 du 14 juillet 2022, chiffre 4 du dispositif).

F.
Le 23 juillet 2022, JBF a conclu un accord de transaction (Transaction Agreement) avec Bobst fixant notamment les termes et conditions d’une offre publique d’acquisition présentée par JBF pour toutes les actions Bobst en mains du public, au prix de CHF 78 par action Bobst. L’accord de transaction prévoit également l’engagement du conseil d’administration de Bobst de recommander aux actionnaires d’accepter l’offre.

G.
Le 25 juillet 2022, JBF a publié l’annonce préalable d’une offre publique d’acquisition portant sur toutes les actions Bobst en mains du public. Rédigée en français, en allemand et en anglais, l’annonce préalable a été publiée sur un site Internet de Bobst dédié à l’offre, et communiquée aux principaux médias ainsi qu’à la Commission avant 7h30.

H.
Le 16 août 2022, JBF a requis la Commission de faire droit aux conclusions suivantes :

« I. L’offre publique d’acquisition de JBF Finance SA est conforme aux dispositions légales et réglementaires en matière d’offres publiques d’acquisition ;  

 II. La Commission publiera sa décision le jour de la publication du prospectus de l’offre.»

A l’appui de sa requête, JBF a soumis à l’examen de la Commission le projet de prospectus de l’offre ainsi qu’un rule check relatif à ce prospectus.

I.
Le même jour, sur interpellation de la Commission, Bobst lui a fait parvenir les projets de rapport du conseil d’administration et d’attestation d’équité (Fairness Opinion) établie par KPMG SA (KPMG).

J.
Le 19 août 2022, la Commission a demandé à Bobst des informations complémentaires sur le projet de Fairness Opinion de KPMG, qui lui ont été communiquées le 22 août 2022.

K.
Une délégation de la Commission formée de Mirjam Eggen (présidente), Jean-Luc Chenaux et Lionel Aeschlimann a été constituée pour se prononcer sur l’offre publique d’acquisition portant sur les actions Bobst.

Droit :

1.  Annonce préalable et publication du prospectus

[1] Selon l’art. 5 al. 1 OOPA, l’offrant peut annoncer une offre avant la publication du prospectus. La publication doit intervenir au minimum 90 minutes avant l’ouverture ou après la clôture du négoce à la bourse à laquelle les titres de participation de la société visée sont cotés (art. 7 al. 2 OOPA). L’annonce préalable doit être diffusée en langues française et allemande (art. 6 al. 1 OOPA). Si la diffusion intervient dans une autre langue, cette version doit être conforme aux textes français et allemand, et tous les documents de l’offre doivent également être rédigés dans cette langue (art. 6 al. 2 OOPA). Les effets liés à la publication de l’annonce préalable sont fixés à l’art. 8 OOPA. L’art. 8 al. 1, 1ère phr., OOPA dispose par ailleurs que le prospectus doit être publié dans les six semaines à compter de la publication de l’annonce préalable.

[2] En l’espèce, l’annonce préalable, diffusée en langues française, allemande et anglaise, contient les indications exigées à l’art. 5 al. 2 OOPA et respecte les exigences de l’art. 6 OOPA. Elle a été rendue accessible sur un site Internet de Bobst dédié à l’offre, et communiquée aux principaux médias visés par l’art. 7 al. 1 let. b OOPA (en relation avec la Circulaire COPA n° 4 : Communication aux principaux médias, du 20 novembre 2015), ainsi qu’à la Commission le 25 juillet 2022 avant 7h30, soit plus de 90 minutes avant l’ouverture du négoce à la SIX, dans le respect des exigences de l’art. 7 al. 2 OOPA. L’annonce préalable produit donc valablement ses effets à compter du 25 juillet 2022. Dans la mesure où la publication du prospectus est prévue le 5 septembre 2022, le délai de six semaines de l’art. 8 al. 1, 1ère phr., OOPA est par ailleurs respecté.

2.  Objet de l’offre

[3] Selon l’art. 127 al. 2 LIMF, l’offrant doit traiter sur un pied d’égalité tous les détenteurs de titres de participation de la même catégorie. Concrétisant ce principe, l’art. 9 al. 2 OOPA dispose que l’offre doit porter sur toutes les catégories de titres de participation cotés de la société visée.

[4] En l’espèce, l’offre publique d’acquisition de JBF porte sur toutes les actions Bobst qui ne sont pas actuellement détenues par JBF, Bobst et les personnes agissant de concert avec JBF dans le cadre de l’offre. Elle porte donc sur 7'697'948 actions Bobst.

[5] Les exigences de l’art. 9 al. 2 OOPA sont ainsi respectées.

3.  Offre volontaire

[6] L’art. 12 des statuts de Bobst contient une clause d’opting out (cf. supra let. A).

[7] Par décision 822/01 du 14 juillet 2022, la Commission a constaté que la clause d’opting out figurant à l’art. 12 des statuts de Bobst était valable du point de vue du droit des OPA et déployait ses effets à l’égard de tout actionnaire ou groupe d’actionnaires qui franchirai(en)t le seuil de 33⅓% des droits de vote de Bobst (cf. décision 822/01 du 14 juillet 2022, chiffre 1 du dispositif).

[8] Il en découle que l’offre publique d’acquisition de JBF doit être qualifiée d’offre volontaire et qu’elle n’est pas soumise aux règles sur le prix minimum de l’art. 135 al. 2 LIMF. JBF est donc libre d’en fixer le prix (art. 9 al. 5, 1ère phr., et al. 6 a contrario OOPA).

4.  Action de concert dans le cadre de l’offre

[9] Dans le cadre d’une offre et en relation avec l’art. 127 al. 3 LIMF, l’art. 12 al. 1 OIMF-FINMA s’applique par analogie à quiconque agit de concert avec l’offrant ou forme un groupe organisé avec lui (art. 11 al. 1 OOPA). Les personnes qui agissent de concert avec l’offrant dans le cadre de l’offre en vertu de l’art. 11 OOPA sont soumises aux devoirs découlant de l’art. 12 OOPA. Il incombe à l’organe de contrôle, en l’espèce BDO SA (BDO), de vérifier le respect de ces règles (art. 28 OOPA).

[10] En vertu de l’art. 19 al. 1 lit. d OOPA, l’offrant doit publier dans le prospectus des indications sur les personnes qui agissent de concert avec lui. Selon la pratique, toutes les sociétés contrôlées par l’offrant et qui agissent de concert avec lui ne doivent pas nécessairement être énumérées dans le prospectus, pour autant que l’organe de contrôle dispose d’une liste complète de ces sociétés (cf. décision 823/01 du 25 juillet 2022 dans l’affaire Valora Holding AG, consid. 3.3 et les références citées).

[11] Selon la pratique de la Commission, les personnes morales que l’offrant contrôle directement et indirectement, les actionnaires qui dominent l’offrant directement et indirectement, et les personnes morales que ces actionnaires contrôlent directement et indirectement sont notamment réputés agir de concert avec l’offrant dans le cadre de l’offre (cf. décision 823/01 du 25 juillet 2022 dans l’affaire Valora Holding AG, consid. 3.1 et les références citées ; décision 816/02 du 13 juillet 2022 dans l’affaire Spice Private Equity AG, consid. 3.2.1). Par ailleurs, la société visée et les personnes morales qu’elle contrôle directement ou indirectement sont réputées agir de concert avec l’offrant lorsque celui-ci conclut un accord de transaction avec la société visée dans un contexte amical (cf. décision 823/01 du 25 juillet 2022 dans l’affaire Valora Holding AG, consid. 3.2.1).

[12] En l’espèce, JBF agit de concert avec Bobst, qu’elle contrôle à hauteur de 53.42% des droits de vote de Bobst (cf. supra let. B) et avec qui elle a au surplus conclu un accord de transaction (cf. supra let. F). Les sociétés que Bobst contrôle directement ou indirectement agissent également de concert avec JBF. A l’exception de sa participation dans Bobst, JBF ne détient pas de participations de contrôle dans d’autres sociétés (cf. prospectus, ch. 4.2).

[13] Par ailleurs, par décision 822/01 du 25 juillet 2022, la Commission a constaté que Thierry de Kalbermatten, président de JBF ainsi que vice-président de Bobst (cf. supra let. A et C) et Alain Guttmann, président de Bobst ainsi que membre du conseil d’administration de JBF (ibid.), agissaient de concert avec JBF dans le cadre de l’offre (cf. décision 822/01 du 14 juillet 2022, chiffre 3 du dispositif). En revanche, elle a considéré, au vu de la Convention d’Actionnaires (cf. supra let. D), que les actionnaires de JBF n’exerçaient pas, ni individuellement, ni collectivement, ni au sein d’un sous-groupe familial, une influence déterminante sur les organes de JBF (cf. décision 822/01 du 14 juillet 2022, consid. 3.3.1). Elle a donc conclu que les actionnaires de JBF n’agissaient pas de concert avec JBF dans le cadre de l’offre publique portant sur les actions Bobst (cf. décision 822/01 du 14 juillet 2022, chiffre 2 du dispositif). La Commission n’a pas identifié de nouvel élément mettant en exergue une coordination ou un soutien particulier avec l’offre considérée ou permettant de retenir une éventuelle action de concert entre les actionnaires de JBF et JBF.

[14] Le prospectus de l’offre contient les indications requises sur les personnes qui agissent de concert avec JBF dans le cadre de l’offre (cf. prospectus, ch. 4.4). Par ailleurs, BDO a confirmé avoir reçu de JBF une liste des personnes agissant de concert avec elle (act. 37). Par suite, les exigences de l’art. 19 al. 1 let. d OOPA sont respectées.

5.  Best Price Rule

[15] Selon l’art. 10 al. 1 OOPA, si l’offrant ou des personnes qui agissent de concert avec lui acquièrent des titres de participation de la société visée à un prix supérieur à celui de l’offre dès la publication de l’offre ou de son annonce préalable, et pendant les six mois qui suivent l’échéance du délai supplémentaire d’acceptation, ce prix doit être étendu à tous les destinataires de l’offre (Best Price Rule). Cette règle est également applicable à l’acquisition d’instruments financiers (art. 10 al. 2 OOPA).

[16] L’organe de contrôle vérifie et atteste du respect de cette règle pendant la durée de l’offre (art. 28 al. 1 lit. d OOPA) et, s’il a des raisons de penser que des violations de la loi sur l’infrastructure des marchés financiers, de ses ordonnances d’exécution ou des décisions de la Commission relatives à l’offre sont intervenues après la publication de celle-ci, le signale sans délai à la Commission et lui adresse un rapport spécial (art. 29 al. 2 OOPA). Il établit un rapport intermédiaire après l’exécution de l’offre, puis un rapport final au terme des six mois qui suivent l’échéance du délai supplémentaire d’acceptation.

[17] En l’espèce, la Commission relève l’absence de prestations appréciables en argent susceptibles d’entraîner l’application de la règle du meilleur prix. Par ailleurs, BDO a confirmé que les plans de participation mis en place par Bobst préalablement à l’offre, à savoir le plan de participation à court terme (short-term incentive plan) et le plan de participation à long terme (long-term incentive plan ; cf. rapport du conseil d’administration, ch. 3.3.1), respectaient les exigences de la règle du meilleur prix au jour de la publication du prospectus de l’offre (act. 37/4). Tout nouveau développement demeure réservé.

[18] Au surplus, la Commission impartit à BDO un délai d’un mois pour lui remettre son rapport final (cf. art. 28 al. 2 OOPA). Ce délai court à compter de l’expiration des six mois qui suivent l’échéance du délai supplémentaire d’acceptation de l’offre.

6.  Condition de l’offre

[19] Selon l’art. 8 al. 1 OOPA, l’offrant doit publier un prospectus d’offre respectant les termes de l’annonce préalable dans les six semaines qui suivent la publication de l’annonce préalable. En l’espèce, la condition contenue dans le projet de prospectus soumis à l’examen de la Commission figure également dans l’annonce préalable.

[20] L’offre est subordonnée à la condition qu’aucune autorité judiciaire ou administrative n’ait rendu de décision ou de mesure empêchant, interdisant ou qualifiant d’illégale, en tout ou en partie, l’offre ou son exécution (cf. prospectus, ch. 3.8).

[21] Selon la pratique de la Commission, cette condition est admissible au regard de l’art. 13 OOPA et elle a effet jusqu’à l’exécution de l’offre (cf. décision 823/01 du 25 juillet 2022 dans l’affaire Valora Holding AG, consid. 6.3 et les références citées).

7.  Actionnaires de référence de l’offrante

[22] En vertu de l’art. 19 al. 1 let. b OOPA, le prospectus contient des informations sur l’identité des actionnaires ou des groupes d’actionnaires qui détiennent plus de 3% des droits de vote de l’offrant et il indique le pourcentage de leur participation respective. Cette exigence s’applique tant aux actionnaires directs qu’aux ayants droit économiques (cf. décision 816/02 du 13 juillet 2022 dans l’affaire Spice Private Equity AG, consid. 7 et les références citées).

[23] En l’espèce, le prospectus comporte les indications exigées par la loi (cf. prospectus, ch. 4.2).

8.  Rapport du conseil d’administration

8.1 Dispositions applicables

[24] Aux termes de l’art. 132 al. 1, 1ère phr., LIMF, le conseil d’administration de la société visée publie un rapport dans lequel il prend position sur l’offre ; les informations qui y figurent doivent être exactes et complètes (art. 132 al. 1, 2ème phr., LIMF). Ce rapport a pour but principal de fournir aux actionnaires toutes les informations nécessaires pour leur permettre de prendre leur décision en toute connaissance de cause (art. 30 al. 1, 1ère phr., OOPA).

8.2 Recommandation et conflit d’intérêts

[25] Selon l’art. 30 al. 3 OOPA, le rapport du conseil d’administration de la société visée peut recommander d’accepter l’offre ou de ne pas l’accepter. Il peut également en exposer les avantages et les inconvénients sans émettre de recommandation.

[26] Afin de fournir une appréciation utile aux actionnaires, le conseil d’administration doit être en mesure de rédiger son rapport de manière indépendante par rapport à l’offre et de présenter des informations objectives (cf. décision 816/02 du 13 juillet 2022 dans l’affaire Spice Private Equity AG, consid. 8). Le rapport doit notamment préciser si certains membres du conseil d’administration ou de la direction supérieure présentent un conflit d’intérêts, et fournir des informations y relatives (art. 32 al. 1 OOPA).

[27] L’art. 32 al. 2 OOPA contient une liste non exhaustive de situations dans lesquelles l’existence d’un conflit d’intérêts est présumée et qui doivent être expressément révélées dans le rapport du conseil d’administration. Parmi elles figurent l’existence de rapports contractuels ou d’autres liens particuliers entre un administrateur et l’offrant (let. a), l’élection ou la réélection d’un administrateur sur proposition du second (let. b et c), la qualité d’organe ou d’employé assumée par un administrateur au sein de l’offrant (let. d), ou l’exercice du mandat d’un administrateur sur instructions de l’offrant (let. e).

[28] En présence de conflits d’intérêts, le conseil d’administration de la société visée doit adopter des mesures afin d’éviter que ceux-ci ne lèsent les intérêts des destinataires de l’offre (art. 32 al. 4 OOPA). Selon la pratique de la Commission, les mesures susceptibles de désamorcer ces conflits consistent dans la récusation des administrateurs confrontés à un conflit d’intérêts, la formation d’un comité indépendant du conseil d’administration de la société visée, constitué d’au moins deux administrateurs indépendants, ou l’établissement d’une attestation d’équité (Fairness Opinion; cf. décision 816/02 du 13 juillet 2022 dans l’affaire Spice Private Equity AG, consid. 8.1.1 ; décision 805/02 du 24 février 2022 dans l’affaire Bank Linth LLB AG, consid. 9.2.1).

[29] En l’espèce, le conseil d’administration de Bobst se compose actuellement de cinq membres, à savoir Alain Guttmann (président), Thierry de Kalbermatten (vice-président), Jürgen Brandt, Gian-Luca Bona et Philip Mosimann (cf. supra let. A). Alain Guttmann et Thierry de Kalbermatten, qui siègent par ailleurs au conseil d’administration de JBF (cf. supra let. C), sont exposés à un conflit d’intérêts au sens de l’art. 32 al. 1 OOPA, en raison notamment de leur appartenance simultanée aux conseils d’administration de l’offrante et de la société visée ainsi que de leur qualité d’actionnaires de JBF et de membres de la Convention d’Actionnaires relative à JBF (cf. supra let. D).

[30] Selon le rapport du conseil d’administration, les autres membres du conseil de Bobst, à savoir Jürgen Brandt, Gian-Luca Bona et Philip Mosimann, ne sont pas affiliés à l’offrante ou ses actionnaires, et ne se trouvent dès lors pas dans une situation de conflit d'intérêts en relation avec l’offre (cf. rapport du conseil d’administration, ch. 3.2.1).

[31] Parmi les membres de la direction générale de Bobst, actuellement composée de Jean-Pascal Bobst (CEO), Attilio Tissi (CFO), Alain Berger (Head of Business Unit Printing & Converting) et Raphaël Indermühle (Head of Business Unit Services & Performance), Jean-Pascal Bobst est exposé à un conflit d’intérêt au sens de l’art. 32 al. 1 OOPA. En effet, il siège au conseil d’administration de JBF (cf. supra let. C) et est actionnaire de JBF ainsi que membre de la Convention d’Actionnaires y relative (cf. supra let. D). Selon le rapport du conseil d’administration, les autres membres de la direction générale de Bobst ne sont pas affiliés à l’offrante et ne reçoivent pas d’instructions de celle-ci, et ne se trouvent dès lors pas dans une situation de conflit d'intérêts en relation avec l’offre (cf. rapport du conseil d’administration, ch. 3.2.2).

[32] Le rapport du conseil d’administration détaille les mesures prises en raison des conflits d’intérêts auxquels les membres du conseil d’administration et de la direction générale de Bobst sont exposés, conformément à l’art. 32 al. 4 OOPA (cf. rapport du conseil d’administration, ch. 3.2). D’une part, Alain Guttmann et Thierry de Kalbermatten se sont récusés et abstenus de participer aux délibérations et décisions du conseil de Bobst relatives à l’offre. D’autre part, le conseil d’administration a, après récusation d’Alain Guttmann et de Thierry de Kalbermatten, constitué un comité ad hoc indépendant qui a donné mandat à KPMG d’établir une Fairness Opinion en qualité d’expert indépendant particulièrement qualifié. Cette Fairness Opinion a servi de base à la conclusion de l’accord de transaction du 23 juillet 2022 (cf. supra let. F) ainsi qu’à la recommandation du conseil d’administration aux actionnaires de Bobst d’accepter l’offre, adoptée à l’unanimité de ses membres en tenant compte de la récusation d’Alain Guttmann et de Thierry de Kalbermatten (cf. rapport du conseil d’administration, ch. 1).

[33] Les mesures adoptées par le conseil d’administration de Bobst sont adéquates et propres à désamorcer les conflits d’intérêts auxquels Alain Guttmann et Thierry de Kalbermatten sont confrontés. Au demeurant, l’approche choisie par le conseil d’administration (à l’exclusion d’Alain Guttmann et de Thierry de Kalbermatten), consistant à s’exprimer (subjectivement) sur l’offre et, se fondant sur la Fairness Opinion d’après laquelle les termes financiers de l’offre sont adéquats (cf. infra consid. 8.3), de recommander aux destinataires de celle-ci de l’accepter, est admise en pratique (cf. décision 756/02 du 20 avril 2020 dans l’affaire Pargesa Holding SA, consid. 8.2).

8.3 Fairness Opinion

[34] Le conseil d’administration, par l’entremise de son comité ad hoc indépendant, a confié à KPMG la tâche de se prononcer sur l’équité financière de l’offre par une Fairness Opinion. Dans son rapport du 2 septembre 2022, KPMG a déterminé la valeur des actions Bobst sur la base de la méthode d’actualisation des flux de trésorerie (Discounted Cash Flow, DCF), employée à titre principal (cf. Fairness Opinion, p. 17 ss et 23 s.). En prenant comme date de référence le 22 juillet 2022, KPMG estime que la valeur par action Bobst, telle qu’elle ressort de cette méthode, est comprise entre CHF 77.90 et CHF 85.80.

[35] La plausibilité des résultats fondés sur la méthode DCF a été vérifiée par la méthode des multiples basés sur des sociétés cotées comparables (Trading Multiples ; cf. Fairness Opinion, p. 25). Faute de transactions comparables en nombre suffisant, la méthode fondée sur la valeur des transactions comparables (Transaction Multiples), brièvement évoquée dans le rapport de KPMG, n’a pas servi de base à l’évaluation (cf. Fairness Opinion, p. 26).

[36] Se fondant sur les analyses et considérations présentées dans la Fairness Opinion, KPMG a conclu que le prix de l’offre, de CHF 78, s’inscrivait dans la marge de fluctuation de l’évaluation et qu’elle était financièrement équitable au 22 juillet 2022 (cf. Fairness Opinion, p. 4 s.).

[37] La Commission considère que la Fairness Opinion décrit de manière transparente, plausible et compréhensible les bases et les méthodes d’évaluation ainsi que les paramètres utilisés. La Fairness Opinion remplit donc les exigences de l’art. 30 al. 5 OOPA.

8.4 Rapport annuel ou intermédiaire

[38] Selon la pratique de la Commission, le dernier jour du délai d’offre ne doit pas être postérieur de plus de six mois à la date de clôture des derniers comptes annuels ou intermédiaires publiés de la société visée. En outre, le conseil d’administration de la société visée est tenu de fournir des informations sur les modifications importantes du patrimoine, de la situation financière, des résultats et des perspectives commerciales intervenues depuis la publication des derniers comptes annuels ou intermédiaires de la société visée. La société visée est tenue de publier un rapport intermédiaire actualisé au plus tard dix jours de bourse avant l’échéance de l’offre ; à défaut, l’offre est prolongée en conséquence (cf. décision 823/01 du 25 juillet 2022 dans l’affaire Valora Holding AG, consid. 8.4 et les références citées).

[39] Les derniers comptes annuels de Bobst ont été arrêtés au 31 décembre 2021, soit plus de six mois avant l’échéance du délai d’offre, en principe le 3 octobre 2022 (cf. prospectus, ch. 10.7). Toutefois, Bobst a publié ses résultats semestriels le 25 juillet 2022, soit plus de dix jours de bourse avant cette échéance. Le rapport du conseil d’administration précise en outre que celui-ci n’a pas connaissance de changements significatifs relatifs aux actifs ou passifs de Bobst ou afférents à la situation financière de Bobst qui seraient survenus depuis la publication des résultats semestriels et seraient susceptibles d’influer sur la décision des actionnaires de Bobst en rapport avec l’offre (cf. rapport du conseil d’administration, ch. 7). Les exigences de la pratique de la Commission sont dès lors respectées (cf. décision 823/01 du 25 juillet 2022 dans l’affaire Valora Holding AG, consid. 8.4 et les références citées).

[40] Pour le surplus, le rapport contient les informations exigées par les dispositions du droit des offres publiques d’acquisition.

9.  Publication

[41] La présente décision sera publiée sur le site Internet de la Commission le jour de la publication du prospectus (art. 138 al. 1 LIMF en relation avec l’art. 65 al. 1 OOPA).

10.       Emolument

[42] En vertu de l’art. 117 al. 2 OIMF, l’émolument prélevé par la Commission pour l’examen d’une offre est calculé proportionnellement à la valeur de la transaction. Tous les titres et dérivés de participation visés par l’offre sont pris en compte, de même que les titres acquis par l’offrant et les personnes agissant de concert avec lui dans les douze mois précédant la publication de l’offre ainsi que les titres qu’ils acquièrent depuis la publication de l’annonce préalable (cf. décision 823/01 du 25 juillet 2022 dans l’affaire Valora Holding AG, consid. 10). En principe, l’émolument s’élève au minimum à CHF 50'000 et n’excède pas CHF 250'000 (art. 117 al. 3, 1ère phr. , OIMF). Dans des cas particuliers, l’émolument peut être augmenté ou réduit dans des proportions pouvant aller jusqu’à 50%, selon l’ampleur et la difficulté de la transaction (art. 117 al. 3, 2ème phr., OIMF).

[43] L’offre de JBF porte sur un total de 7'697'948 actions Bobst, au prix de CHF 78 par action Bobst. Au cours des douze mois précédant la publication de l’annonce préalable, Bobst a, par l’intermédiaire de sa filiale Bobst Mex SA, acquis un total de 8'394 actions Bobst, pour un prix unitaire maximum de CHF 82. JBF et les autres personnes agissant de concert avec elle n’ont pas acquis d’actions Bobst ou de dérivés ayant ce titre comme principal sous-jacent au cours des douze mois précédant la publication de l’annonce préalable. Depuis la publication de l’annonce préalable, JBF a acquis 111'392 actions Bobst, pour un prix maximum unitaire de CHF 78.

[44] Il découle de ce qui précède que la valeur totale de la transaction s’élève à CHF 609'816'828. En application de l’art. 117 al. 2 à 4 OIMF, l’émolument mis à la charge de l’offrante est fixé à CHF 121'963. L’émolument prélevé au titre de la décision 822/01 du 14 juillet 2022, d’un montant de CHF 20'000, n’est pas déduit de ce montant (art. 118 al. 3 a contrario OIMF).

 

La Commission des OPA décide :

1. L’offre de JBF Finance SA portant sur les actions de Bobst Group SA est conforme aux dispositions légales et réglementaires en matière d’offres publiques d’acquisition.

2. La présente décision sera publiée sur le site de la Commission des OPA le jour de la publication du prospectus.

3. JBF Finance SA acquittera un émolument de CHF 121'963.

 

 

La présidente :

Mirjam Eggen

 

 

Notification aux parties :

- JBF Finance SA, représentée par Mes Jacques Iffland et Ariel Ben Hattar, Lenz & Staehelin SA, Genève;

- Bobst Group SA, représentée par Mes Dieter Gericke et Olivier Bühlmann, Homburger SA, Zurich.

 

  

Communication :

- BDO SA, organe de contrôle.

 

 

Recours (art. 140 de la loi sur l’infrastructure des marchés financiers, RS 958.1)

Un recours contre la présente décision peut être formé dans un délai de cinq jours de bourse auprès de l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers FINMA, Laupenstrasse 27, CH-3003 Berne. Le délai commence à courir le premier jour de bourse suivant la notification de la décision. Le recours doit respecter les exigences des art. 140 al. 2 LIMF et 52 PA (RS 172.021).